Justice: la réforme pénale pourrait sonner le glas d’affaires de santé publique

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logo_lexpress.gif   Par AFP, publié le 19/03/2010 à 09:27 – mis à jour le 19/03/2010 à 09:24

PARIS – Des voix s’élèvent dans le monde judiciaire pour dénoncer la refonte des délais de prescription, prévue par la réforme de la procédure pénale, qui pourrait sonner le glas d’affaires de santé publique, des dossiers complexes qui éclatent souvent des années après les faits.

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AFP/Jacques Demarthon
Des proches de victimes de l’hormone de croissance rassemblés le 6 février 2008 devant le Palais de Justice à Paris

« Les futurs délais de prescription risquent d’enterrer certaines affaires financières, mais ils sont encore plus dangereux pour les victimes de scandales sanitaires. Ce n’est pas parce que l’on est puissant que l’on doit être amnistié« , s’emporte Jeanne Goerrian, présidente de l’association des victimes de l’hormone de croissance.

L’avant-projet de réforme de la procédure pénale, qui prévoit notamment la suppression du juge d’instruction, allonge les délais de prescription de 10 à 15 ans en matière criminelle et de trois à six ans pour des délits passibles de peines d’au moins trois ans de prison.

Mais, prévient l’avant-projet, « la prescription de l’action publique court à compter du jour où l’infraction a été commise, quelle que soit la date à laquelle elle a été constatée« .

Or, actuellement et en vertu d’une jurisprudence de la Cour de cassation de juillet 2005, pour certains délits dissimulés, les délais de prescription courent à partir du moment où l’infraction a été mise au jour.

Cet arrêt a eu une incidence particulière en matière de santé publique puisqu’il permet à des personnes, qui découvrent 10 ou 15 ans après les faits présumés qu’elles sont contaminées ou intoxiquées, d’engager une action en justice. Désormais, elles devront se manifester six ans au maximum après les faits alors que certaines maladies, comme celle de Creutzfeldt-Jakob, ont des délais d’incubation de plus de dix ans.

« Cette réforme concernerait quasiment toutes les affaires liées à la sécurité sanitaire et alimentaire dans lesquelles la tromperie aggravée, instrument majeur de poursuite pénale, est souvent le moyen d’aboutir à un procès puisque l’homicide involontaire est difficile à établir« , prévient Me Bernard Fau, avocat spécialisé en santé publique.

Selon lui, ce projet est le résultat du « lobbying de certains groupes » et d’un « politiquement correct français qui rechigne à remettre en cause les professionnels de santé ou les entrepreneurs qui évoluent dans la santé« .

Pour le ministère de la Justice, « rien n’est figé« .

« Ce que nous voulons éviter c’est le statu quo. Mais dans le cadre de la concertation qui doit être menée pendant deux mois, tous les sujets, en particulier liés à la prescription, peuvent être discutés« , assure-t-on à la Chancellerie.

« Ces dossiers vont passer à la trappe« , prévient Me Karim Felissi, avocat de la Fnath (accidentés de la vie). « Cela montre l’absence totale de réflexion sur la responsabilité pénale des grands groupes industriels et dans le même temps, on va dire aux victimes +vous avez effectivement une pathologie, qui a mis du temps à incuber, mais vous l’avez contractée il y a trop longtemps, circulez il n’y a rien à voir! » s’alarme l’avocat.

La juge d’instruction Marie-Odile Bertella-Geffroy « confirme que cette modification de la prescription toucherait immédiatement et de plein fouet les dossiers comme le nuage de Tchernobyl ou l’hormone de croissance dans lesquels la tromperie aggravée a été utilisée« .

Favorable au justiciable, cette réforme serait en effet d’application immédiate.

« Cela peut aussi malheureusement toucher à l’avenir des dossiers potentiels comme les antennes-relais, les pesticides ou les nano-technologies« , ajoute la magistrate. « Ces dossiers seraient, qui plus est, – si le juge d’instruction est réellement supprimé – traités par un parquet qui n’est pas indépendant« .

Source :  http://www.lexpress.fr/actualites/1/justice-la-reforme-penale-pourrait-sonner-le-glas-d-affaires-de-sante-publique_856467.html

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LA-D-p-che-copie-1.png   Publié le 20/03/2010 08:36 | LaDepeche.fr

Scandales de santé étouffés demain ?

Justice. Réforme pénale et délais de prescription.

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Les délais de prescription vont être révisés. Photo DDM, archives

Des voix s’élèvent dans le monde judiciaire pour dénoncer la refonte des délais de prescription, prévue par la réforme de la procédure pénale, qui pourrait sonner le glas d’affaires de santé publique, des dossiers complexes qui éclatent souvent des années après les faits.

« Les futurs délais de prescription risquent d’enterrer certaines affaires financières, mais ils sont encore plus dangereux pour les victimes de scandales sanitaires. Ce n’est pas parce que l’on est puissant que l’on doit être amnistié », s’emporte Jeanne Goerrian, présidente de l’association des victimes de l’hormone de croissance.

L’avant-projet de réforme de la procédure pénale, qui prévoit notamment la suppression du juge d’instruction, allonge les délais de prescription de 10 à 15 ans en matière criminelle et de trois à six ans pour des délits passibles de peines d’au moins trois ans de prison. Mais, prévient l’avant-projet, « la prescription de l’action publique court à compter du jour où l’infraction a été commise, quelle que soit la date à laquelle elle a été constatée ».

Or, actuellement et en vertu d’une jurisprudence de la Cour de cassation de juillet 2005, pour certains délits dissimulés, les délais de prescription courent à partir du moment où l’infraction a été mise au jour.

Cet arrêt a eu une incidence particulière en matière de santé publique puisqu’il permet à des personnes, qui découvrent 10 ou 15 ans après les faits présumés qu’elles sont contaminées ou intoxiquées, d’engager une action en justice. Désormais, elles devront se manifester six ans au maximum après les faits alors que certaines maladies, comme celle de Creutzfeldt-Jakob, ont des délais d’incubation de plus de dix ans.

La juge d’instruction Marie-Odile Bertella-Geffroy « confirme que cette modification de la prescription toucherait immédiatement et de plein fouet les dossiers comme le nuage de Tchernobyl ou l’hormone de croissance dans lesquels la tromperie aggravée a été utilisée ». « Cela peut aussi malheureusement toucher à l’avenir des dossiers potentiels comme les antennes-relais, les pesticides ou les nano-technologies », ajoute la magistrate.

Source :   http://www.ladepeche.fr/article/2010/03/20/801262-Scandales-de-sante-etouffes-demain.html

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Lire « La santé publique malade de la justice » en cliquant ici.

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