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Solène Boyer on fév 22nd, 2010
L’antenne sur l’immeuble de la rue Olivier Métra. Les personnes vivant directement sous l’antenne ne sont pas les plus exposées, à l’inverse de celles qui vivent en face.
Malgré l’annonce début 2009 de son retrait imminent, l’antenne relais de téléphonie mobile de la rue Olivier Métra nargue encore les habitants du quartier Jourdain depuis le toit où elle est installée. Entre coup de gueule et résignation, riverains, associations et certains élus se battent depuis plusieurs années contre l’opérateur Orange pour obtenir le démantèlement de cette antenne.
A quoi sert la Charte parisienne?
On pourrait se réjouir que Paris ait signé une Charte sur le contrôle des émissions des antennes relais avec les trois principaux opérateurs de téléphonie mobile (Orange, SFR et Bouygues Télécom). Mais cet accord brandi par la mairie de Paris comme la solution à tous les problèmes ne semble pas faire le poids face à la pression des lobbies.
Signée en 2003, la charte fixe à 2 Volts par mètre (V/m) sur 24h le seuil d’émission maximal. De l’aveu même de Marc Arazi, coordinateur régional Ile-de-France de Priartém : “Ce seuil maximal doit être revu à la baisse. On veut faire respecter une émission maximale de 0,6V/m en situation normalisée. La mesure actuelle sur 24h est une contrevérité puisqu’il s’agit d’une moyenne, il pourrait très bien y avoir des pics à 4 ou 5 V/m, voire 10V/m”. Priartém (Pour une réglementation des implantations des antennes relais de téléphonie mobile) est une association qui veille au respect des conditions de santé potentiellement mises en danger par les ondes électromagnétiques.
Plus radical, Yves Breton estime que cette charte n’est “qu’une poudre aux yeux”. Il peut d’ailleurs s’en rendre compte tous les jours depuis la fenêtre de son appartement qui donne sur l’antenne. ” La charte permet aux politiques de donner l’impression d’une réglementation, mais dans les faits il n’y a pas d’obligation juridique pour les opérateurs”, dénonce-t-il.
Yves Breton affirme souffrir “d’acouphènes”. Son appartement se situe à moins de 30 mètres de l’antenne décriée. “Je ne suis pas le seul de l’immeuble à me plaindre de ce symptôme et il y en a d’autres.”. Voilà plus de 3 ans que ce photographe, aidé par son voisin Nicolas Teichner et de nombreux autres riverains, bataille contre Orange, relevés d’émissions hors-charte à l’appui. Les frais que représenteraient une action en justice contre Orange sont tellement dissuasifs que, dans la rue Olivier Métra, le statu quo demeure.
Aux grands maux les remèdes de fortune, Yves Breton vit calfeutré derrière des couvertures de survie en attendant le retrait de l’antenne qui fait face à sa fenêtre. Photo : S. Boyer Système D
Exaspéré par cette situation, Yves Breton avoue qu’il “a un peu laissé tombé cette histoire et a pas mal délégué l’action aux associations comme Priatém et Agir pour l’environnement”. Dans son appartement, les murs qui donnent sur l’antenne relais sont recouverts de couvertures de survie et les rideaux ont une trame métallique, une bien maigre protection contre les ondes. Il confesse alors à demi-mot : “L’alternative la plus simple qui s’offre à nous, reste encore de déménager”.
L’annonce du démantèlement
Pourtant, la Ville de Paris semble très concernée par les nuisances causées par les antennes relais. Au nom du principe de précaution, une commission de concertation présidée par Anne Hidalgo, première adjointe au maire de Paris Bertrand Delanoë, a été mise en place pour répondre aux inquiétudes des riverains.
Cette commission aura eu raison des opérateurs puisque, le 13 janvier 2009, elle annonce le démantèlement prochain de l’antenne de la rue Olivier Métra. Janine Le Calvez, présidente de Priartém, qui a assisté à cette réunion se souvient : “Anne Hidalgo a demandé le démontage total du site et souhaité qu’une solution alternative soit proposée en collaboration avec la mairie du 20e.”
Un an après, toujours rien
Alors pourquoi, plus d’un an après, rien n’a été fait ? Le cabinet d’Anne Hidalgo apporte son élément de réponse : “Tout d’abord, nous n’avons pas annoncé le retrait catégorique de cette antenne, nous avons annoncé l’engagement pris avec l’opérateur pour son retrait.”
Nous y voilà, un engagement… Et lorsqu’on demande le délai imparti pour répondre à cet engagement, le cabinet de la première adjointe du maire de Paris répond qu’un site de substitution a déjà été trouvé et que le démantèlement interviendra lorsque ce site sera opérationnel. Pourtant les décisions prises lors de cette réunion, toujours d’après l’extrait du PV, stipulent bien qu’“un site de substitution devra être proposé dans un délai de trois mois par l’opérateur Orange France en concertation avec la mairie du 20e”. Pour Marc Arazi de Priartém, il était temps que quelqu’un prenne ses responsabilités : “On entend la préoccupation des élus, mais nous on veut du concret.”
Du concret, c’est aussi ce que réclame Yves Breton. A ce jour, un courrier de la médiatrice de Paris est la seule réponse officielle qu’il a obtenue. La lettre fait état de la demande de démantèlement de l’antenne auprès d’Orange et clôt le dossier. Elle est datée du 7 mai 2009. Depuis, plus rien. Et l’antenne continue d’émettre.
“La réalité c’est que des gens souffrent”
Mais les contradictions vont bien au-delà de la question des délais comme l’explique Florence de Massol, adjointe à la maire du 20e chargée de l’Environnement : “Orange a accepté le déplacement de l’antenne. Ils ont les cartes en main. Selon eux, les mesures prises chez les habitants sont contradictoires, en effet parfois elles dépassent le seuil mais pas tout le temps. Ils utilisent cet argument pour ralentir le processus. Ces mesures sont réalisées par deux laboratoires indépendants et, quelques en soient les résultats, la réalité c’est que certaines personnes souffrent de cette situation.”
Devant l’immobilisme des acteurs concernés, c’est la mairie du 20e qui a trouvé un site de substitution. Le 8 janvier 2010, l’ autorisation d’installation de l’antenne sur un nouveau site (au 15, rue des Pavillons) est validée. Bien qu’il soit aberrant que les élus travaillent pour les opérateurs, Florence de Massol défend la démarche : “Si l’on veut que la situation se débloque, il n’y a pas d’autre solution.”
Difficile alors de comprendre comment, le 6 février 2010, Orange peut encore affirmer sans trembler : “A ce jour aucun site ne permet d’envisager une substitution.”
Schyzophrènes
Pour les associations qui militent contre les antennes, il y aurait un vrai déni de la part de certains scientifiques à la botte des opérateurs. De nombreuses études publiées par Piartém mettent en relief les risques sanitaires liés à une trop forte exposition aux ondes électro-magnétiques.
La mairie de Paris nuance largement ce danger. A l’unisson de l’opérateur Orange qui affirme sur son site que : “Parmi les études entreprises récemment, aucune ne permet de conclure que l’exposition à des champs de radiofréquences émis par les téléphones mobiles ou leurs stations de base [antennes relais] ait une incidence néfaste quelconque sur la santé.”
Si Orange affirme qu’il n’y a pas de risque, l’opérateur n’en a pas moins signé une charte pour préserver les riverains d’un champ d’émissions trop élevées. Pour les élus l’importance de la téléphonie mobile et le bon fonctionnement du réseau sont devenus une question d’intérêt général. Certaines initiatives voient le jour comme celle des micro-antennes lancée par Bertrand Delanoë lors de ses vœux pour 2010. Une initiative qui résonne comme un aveu de la mairie face aux risques que font peser les antennes sur la santé publique. Les effets d’annonces ne remplaçant pas l’action concrète, les opérateurs continuent à s’en tirer à bon compte et les riverains à s’angoisser.
Source : http://le75020.fr/paris-XXe-75020-20e-arrondissement/a-la-une/8255-onde-antenne-relai-orange-mairie-paris.paris-75020-info