Amiante : 400 à 500 tonnes de déchets en plein air au cœur de Saint-Alban
PUBLIÉ LE 28/05/2011 10:19 | PHILIPPE EMERY
Les déchets amiantés au cœur de la zone d’activités, à deux pas du Géant Fenouillet./Photo DDM, N. Saint-Affre
Le dépôt de déchets amiantés, présente un « danger grave et imminent », selon le médecin et l’inspection du travail. 5 employés de Gerlero refusent d’y travailler depuis jeudi.
Le dépôt est invisible depuis la RN 20 et l’hypermarché Géant-Fenouillet tout proches. Au cœur d’une discrète zone industrielle de Saint-Alban, on pénètre dans l’entreprise de démolition Gerlero et Fils par la rue de Fenouillet, que bordent une crèche, désaffectée depuis quelques semaines, et plusieurs maisons. Derrière les bureaux, à deux pas des réserves de deux grandes surfaces, où travaillent chaque jour de nombreux employés, « entre 400 et 500 tonnes de déchets amiantés (sont) stockées à l’air libre dans un état de dégradation avancée », selon la société de certification Qualibat.
« Big bag (gros sacs de chantier) éventrés, feuilles de polyane déchirées, stockage de plaques de fibrociment en plein air… Il existe un réel danger grave et imminent pour vos salariés (et) pour les riverains et commerces tout autour en fonction des vents dominants (autan et vent d’ouest) », écrivait le médecin du travail à Gerlero, le 21 février dernier.
Le 28 février, deux contrôleurs du ministère du Travail inspectaient le site : « Deux salariés effectuaient des travaux de reconditionnement de matériaux fortement dégradés
[…] contenant de l’amiante friable[…] les deux employés n’étaient pas habilités pour ce type de travaux et étaient équipés de protections individuelles non appropriées ». Des déchets étaient « entreposés pour certains depuis des années » sur ce terrain, sans les autorisations requises, relevaient aussi les contrôleurs qui ordonnaient l’arrêt immédiat des travaux de stockage, l’interdiction d’accès à la zone et le transport immédiat dans des emballages appropriés vers des déchetteries spécialisées. Rien n’a été fait depuis et, ce jeudi, cinq des 14 employés de Gerlero ont fait jouer leur droit de retrait et cessé le travail, informait hier le syndicat local Construction de la CGT, qui a distribué un tract dans la commune dès jeudi. Gerlero, dont la direction a refusé de s’exprimer hier, aurait des difficultés financières depuis 2008. La société devait être cédée, avec son personnel, en début d’année, mais le repreneur s’est désisté au dernier moment. « C’est un scandale industriel », s’est insurgé Cédric Vergé, leader de l’opposition municipale de Saint-Alban, tandis que le maire, Raymond-Roger Stramare, dont les services ont été alertés par une plainte du voisinage dès septembre 2010, faisait savoir que le dossier était traité par les services de l’État.
Des enfouissements sauvages ?
Gerlero se serait laissé aller à des pratiques douteuses, selon un de ses employés. Xavier, actuellement en arrêt maladie, précise : « Non habilité à travailler sur l’amiante, j’ai été forcé de participer à certains chantiers de désamiantage. Je me souviens de celui de Rouleau Guichard, route d’Espagne près d’AZF. Pour aller plus vite, on nous a ordonné d’enfouir des déchets sur place et alentour dans des fosses qu’on a sommairement recouvertes. Sur d’autres chantiers en région, on a jeté des déchets dans des lacs. Les clients, pas informés, étaient facturés comme si on avait travaillé normalement ». La CGT envisage de porter plainte au pénal.