Ondes de téléphonie : le début d’une contestation d’ampleur ?

Accueil   Par Marine Richard | Ecrivain & journaliste | 19/07/2011 | 16H11

La liste des actions entreprises contre la téléphonie mobile ces dernières semaines est quasiment sans fin :

Que se passe-t-il ? Les Français n’écouteraient-ils plus les adages de l’Académie de médecine, dont le principal conseil en matière de champs électromagnétiques est Didier Aurengo, ancien conseiller scientifique de Bouygues Télécom ? Ne se fieraient-ils plus à l’État français pour les protéger – État dont l’actuelle ministre de l’Ecologie, Nathalie Kosciusko-Morizet, a enterré son projet de loi visant à protéger la population des radiofréquences depuis qu’elle fait partie du gouvernement ?

Préféreraient-ils écouter les recommandations du conseil d’experts de l’OMS qui, après avoir évincé de son collège les scientifiques compromis avec les opérateurs, a déclaré récemment le téléphone portable « cancérogène possible » ? Se fieraient-ils au Conseil de l’Europe qui a demandé le 6 mai dernier aux États membres de revoir leurs normes de sécurité en matière de téléphonie mobile dans les plus brefs délais ?

« Mauvaises ondes »

Les Français ne croiraient-ils plus en l’indépendance des chercheurs, après que ledocumentaire « Mauvaises Ondes », programmé sur France 3 le 18 mai 2011 a brillamment montré que si leurs résultats n’étaient pas conformes aux attentes des commanditaires, ils disparaissaient aux oubliettes ? (Voir un extrait, de 6m30)

Un soupçon se serait-il dessiné dans leurs esprits quand, le 15 juin 2011, sur France 5, le représentant des opérateurs, Jean-Marie Danjou, esquiva par une faiblarde pirouette à plusieurs reprises la question pourtant simple du journaliste Yves Calvi : « accepteriez-vous de mettre par écrit que les ondes de la téléphonie mobile sont sans danger pour la santé ? »

Que se passe-t-il ? Les Français commenceraient-ils à soupçonner que les milliards d’euros de recettes des géants de la téléphonie mobile auraient pu justifier quelques petites cachotteries quant à la réalité du risque sanitaire qu’encourt la population ? (Bouygues Telecom : 5,6 milliards d’euros ; SFR : 12,6 milliards ; Orange : 22,8 milliards, d’après leurs sites respectifs)

Des études scientifiques sonnent l’alerte

Les opérateurs auraient par exemple pu faire signer à un gouvernement Jospin sur le départ des normes d’émissions de radiofréquences aberrantes qui ne prennent pas en compte les effets biologiques non thermiques des micro-ondes pulsées.

Ou bien ils auraient pu, à force de lobbying, pousser l’Agence française de sécurité sanitaire (Afsset) à déclarer par la voix de son directeur général adjoint, Gérard Lasfargues, que certes le téléphone portable génère une modification du débit sanguin cérébral, mais que « cela ne veut pas dire que c’est grave. C’est une réaction physiologique normale de l’organisme mais cela veut dire qu’il se passe quelque chose » (sur TF1, le 25 février 2011).

En furetant un peu sur Internet, lesdits Français auraient-ils senti les cheveux se dresser sur leurs têtes face à la foultitude des (très accessibles) études scientifiques qui sonnent l’alerte ?

Des endroits préservés de la pollution électromagnétique

« C’est pas possible ! Qu’est-ce que c’est que ça, encore ? », se sont peut-être inquiétés les Français, effarés d’apprendre que leur génial smartphone ou leur Wifi si pratique peut déclencher chez les personnes prédisposées, et même à bonne distance, de violents maux de tête, des troubles de la concentration, de la mémoire, de l’équilibre, des nausées, des pertes de poids, des dépressions, des crises de tachycardie, des arythmies cardiaques et peut-être même des accidents vasculaires cérébraux

Les Français auraient-ils alors entendu parler de la première consultation pour personnes électrohypersensibles du pays, ouverte par le professeur d’oncologie Dominique Belpomme, unique médecin français à se pencher sur la question, quand les praticiens d’autres pays signent par milliers des appels à un changement des pratiques ?

Auraient-ils appris que celui-ci a déjà reçu plus de 500 malades chez qui il a pu mettre en évidence leur électrohypersensibilité par plusieurs marqueurs spécifiques et que son traitement expérimental soulage certaines personnes, mais que ce qu’il leur faut, à ces patients, pour guérir vraiment, ce ne sont pas des médicaments, car au fond, ils ne sont pas malades. Ce qu’il leur faut, ce sont des endroits préservés de la pollution électromagnétique. Or de tels endroits n’existent plus, grâce à l’obligation faite aux opérateurs de couvrir le territoire dans son entier.

Grossières manipulations des réalités scientifiques

« Oh la la », ont sans doute pensé les Français, en voyant l’image de personnes comme moi, survivant dans des parkings souterrains, des grottes, des forêts et se déplaçant caparaçonnées d’un voile métallique qui arrête les ondes. « Pourvu que ça n’arrive pas à mes enfants ! », se sont-ils certainement exclamés, décidant sur-le-champ de se mobiliser comme ils peuvent contre l’implantation de la nouvelle antenne de téléphonie ou de Wimax sur leur commune.

Serait-ce possible, une telle onde de résistance ? Cette mobilisation tous azimuts ne serait-elle pas plutôt l’expression d’une psychose collective tout-à-fait irrationnelle ?

C’est ce que les opérateurs – décidément rois de la cabriole – tentent encore désespérément de nous faire croire par de grossières manipulations des réalités scientifiques, osant sans rire mettre à égalité les effets des micro-ondes pulsées et ceux des ondes radio, qui seraient selon eux « de même nature au plan sanitaire. »


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