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Mesures des antennes-relais : du sur-mesure pour les opérateurs

Par Julie Banos | Etudiante en journalisme | 11/02/2009 | 15H44

Pour déterminer les conséquences des émissions, encore faudrait-il des mesures fiables. Exemple chez un couple parisien.

Antennes relais dans le quartier d'Yvonne et Michel, à Paris (DR)

La condamnation de Bouygues Telecom à démonter une antenne relais dans la région lyonnaise la semaine dernière a relancé le débat sur le danger des ondes électromagnétiques. Mais pour déterminer les éventuelles conséquences sur la santé, il faut des mesures fiables. Et les relevés actuels sont loin de faire l’unanimité.

Exemple avec Yvonne et Michel, habitants du XVe arrondissement de Paris. Ils vivent au dernier étage d’un immeuble moderne de dix étages. Ils ont, depuis plus de cinq ans, cinq antennes au-dessus de leur tête. Six autres sont placées sur le toit du bâtiment voisin.

Les opérateurs et la préfecture de police collaborent pour les mesures

Il faut dire que le lieu remplit les conditions idéales : un toit plat, un immeuble haut mais pas trop… et des occupants pas trop gênants : locataires, ils n’ont pas leur mot à dire sur l’installation des relais, décidée par le propriétaire, un bailleur social. Chaque antenne lui rapporte en moyenne 5 000 euros par an.

Au moment de leur installation en 2004, les antennes n’inquiètent pas les habitants. Mais trois ans plus tard, le couple se plaint de maux de têtes, d’insomnies et de démangeaisons. Ils découvrent l’association Robin des toits, qui alerte depuis des années sur les dangers supposés des ondes électromagnétiques pour la santé.

Pour connaître exactement le taux de radiation émis au-dessus de leurs têtes, Yvonne et Michel ont voulu les faire évaluer, une possibilité offerte gratuitement par la préfecture de police. Mais ils ont vite compris : « il est impossible d’obtenir des mesures en toute indépendance ».

Le laboratoire central de la préfecture, chargé de ces relevés, travaille main dans la main avec les entreprises de téléphonie chez les particuliers. Ce sont même les opérateurs qui financent l’opération, trop coûteuse pour des particuliers (entre 700 et 1 000 euros).Mais les laboratoires travaillent de leur côté,sans prévenir les opérateurs de leur visite.

De quoi tout de même alimenter les soupçons des associations : prévenus à l’avance, SFR, Bouygues ou Orange auraient la possibilité de baisser l’intensité de leurs émetteurs avant la venue des techniciens du laboratoire…

Seule la moyenne des émissions dans l’appartement a été prise en compte

Ces derniers sont donc passés chez Yvonne et Michel, prenant des mesures dans toutes les pièces avant d’aller chez les voisins de palier. Première surprise pour le couple : « On voulait qu’ils mesurent le taux dans tout l’immeuble ! »

Les appareils ont enregistré le taux d’émission des antennes pendant trois heures, durant la matinée. Ils utilisent un protocole pour s’adapter à leurs impératifs .Il permet d’extrapoler les résultats afin que trois heures de mesures soient équivalentes à 24 heures effectives, selon les recommandations des experts et de la Charte de Paris, signée entre la mairie et les opérateurs en 2005.

Quelques semaines plus tard, ils reçoivent le verdict. Troisième surprise : si les antennes émettent 0,8 volts par mètre dans leur salon, le taux est de 3,47 volts par mètre dans leur chambre. Une différence que la moyenne spatiale (2,71 volts par mètre) établie ne prend pas en compte. Pour calculer cette dernière, le laboratoire de la préfecture fait la moyenne de tous les résultats pris à des hauteurs variées.

Réaction des principaux intéressés : « On ne comprend rien à ces tableaux de chiffres, ils font exprès de donner des résultats compliqués. » Or, les opérateurs s’appuient sur la moyenne des relevés, et non sur les pics.

En France, Bouygues, Orange et SFR sont autorisés à émettre des ondes dont l’intensité de champ électrique reste inférieure à 41 volts par mètres. Les défenseurs d’une meilleure réglementation des antennes veulent que cette limite soit descendue à 0,6 volts par mètre pour éviter des effets sur la santé.

La charte de Paris n’est pas respectée par les opérateurs

La charte de Paris, préconise plutôt un taux de 2 volts par mètre pour les 2 143 antennes de la capitale. Et prévoit une procédure de mesures irrégulières :

« En cas de dépassement de l’une des valeurs d’un point (et non plus de la seule moyenne), les opérateurs se sont désormais engagés par écrit devant la Ville de Paris à intervenir. »

Les opérateurs téléphoniques ne tiennent pas compte de la charte, ce que dénoncent les associations de réglementation des antennes relais, qui proposent des mesures basée sur un protocole différent. Eux s’appuient ainsi sur les données les plus hautes affichées par les courbes de mesures.

Quand aux risques réels des ondes électromagnétiques pour la santé, à en croire les autorités de santé, ils sont toujours incertains. L’OMS reste prudente avec son aide-mémoire et l’Agence française de sécurité sanitaire se contente d’adresser des recommandations.

Dans ce quartier du XVe, les habitants ont créé un collectif, envoyé des lettres aux entreprises de téléphonie mobile. Réaction de ces derniers : les antennes ont été cachées après des opérations… d’embellissement, posant une plaque de tôle, ce qui n’a aucun effet sur le niveau des émissions.

Leur expérience montre en tout cas que les conditions de mesure des radiations figurent parmi les sujets possible du « Grenelle des antennes », annoncé par Nathalie Kosciusko Morizet et prévu le 19 mars.

Source : 

http://www.rue89.com/2009/02/11/mesures-des-antennes-relais-du-sur-mesure-pour-les-operateurs

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