Par Sophie Verney-Caillat | Rue89 | 02/02/2011 | 19H48
La ministre de l’Ecologie veut des gaz de schiste propres ou rien. Nathalie Kosciusko-Morizet, qui a hérité de ce dossier pourri, « demande l’arbitrage de Matignon », affirme la députée européenne Michèle Rivasi, qui a été reçue par la ministre ce mercredi. Sentant la colère gronder sur ce sujet, NKM aurait « pris la dimension politique » du sujet.
L’exploitation du gaz de schiste, aux Etats-Unis notamment, est jusque-là une catastrophe pour l’environnement. Lors des questions au gouvernement à l’Assemblée nationale, NKM a annoncé qu’elle lançait une « mission pour évaluer les enjeux environnementaux » de cette nouvelle technologie d’extraction du gaz contenu dans le sous-sol et qu’« aucune autorisation de travaux ne sera donnée ni même instruite avant le résultat de cette mission ».
« Si la seule technologie disponible est celle des Etats-Unis, il n’y aura pas de permis donné », a juré la ministre, bien consciente que la contamination de l’eau constatéedans les forages des Appalaches a de quoi inquiéter.
Michèle Rivasi a passé une heure en tête à tête avec la ministre. L’élue (Europe Ecologie du Grand Sud-Est) est montée au créneau, comme ses collègues de tous bords de la région, car « les premiers forages devaient intervenir à Villeneuve-de-Berg dans le semestre ». (Voir la carte réalisée par OWNI.fr)
Les annonces de la ministre semblent donner un répit jusqu’à l’été, même si aucun moratoire n’est décrété. Dans des déclarations précédentes, Nathalie Kosciusko-Morizet avait indiqué qu’il était impossible de décréter un moratoire sans violer le code minier.
Michèle Rivasi dit son sentiment à l’issue de cette rencontre avec NKM :
« Elle n’est pas contente de se retrouver avec ce dossier, c’est un piège que lui a laissé Borloo, cadeau empoisonné. Elle a été au courant au dernier moment des permis donnés en mars 2010. »
Le gouvernement a accordé trois permis d’exploration de gaz dans le Grand Sud, notamment à Total et GDF-Suez, et trois autres d’huile de schiste en Ile-de-France, deux techniques d’extraction non-conventionnelle qui font espérer aux industriels une réponse face à la crise énergétique.
NKM « prise en étau »
Comme d’autres députés écolos qui l’ont côtoyée auparavant, Michèle Rivasi ne fait pas de procès d’intention à la ministre :
« Elle est prise en étau ; des députés, des maires lui écrivent, elle voit que la mobilisation monte, tous partis confondus, et que certains maires utilisent même leurs pouvoirs de police sanitaire pour interdire le forage dans leur commune. Elle cherche à gagner du temps. »
Ce qui inquiète la députée européenne, ce sont les expertises qui vont être menées dans les mois qui viennent :
« Quels experts vont éclairer la mission ? S’ils sont issus de l’Institut français du pétrole, très proche de Total, c’est mal parti… »
Bové : « Quelle est la position de la France ? »
Pour José Bové, en pointe sur la mobilisation sur le plateau du Larzac, les annonces de NKM sont « un premier pas, mais la seule solution juridique serait l’abrogation des permis d’exploration, afin d’avoir un débat calme sur la facturation hydraulique. »
Alors que les chefs d’Etat européens se réunissent ce vendredi à Bruxelles pour évoquer notre avenir énergétique, José Bové interpelle le gouvernement :
« La Pologne veut explorer l’option gaz de schiste, la Suède et la Belgique disent “pas question”, moi je demande quelle est la position de la France ? Il faut un message clair. »
Pour info, voici la bande-annonce du documentaire Gasland, sur les conséquences des gaz de schiste aux Etats-Unis, et qui a beaucoup participé à la mobilisation contre cette technique. (Voir la vidéo, en anglais)