mercredi, 01 juin 2011
L’alerte des experts de l’OMS réunis à Lyon sur les risques potentiels de cancer provoqués par les portables ne devrait pas surprendre le public français. Dés 2007, l’Afsset (Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail) aujourd’hui intégrée à l’Anses, soulignait que si les preuves épidémiologiques n’étaient pas établies, il convenait de continuer et de parfaire les recherches mais aussi de mettre en œuvre le principe de précaution.
A commencer par les enfants : « Une partie de la population nourrit des craintes quant aux effets des champs électromagnétiques radiofréquences sur la santé des foetus, des enfants et des adolescents. Ces craintes sont justifiées par l’utilisation de plus en plus précoce des techniques de communication sans fil, par la durée bien plus longue de l’exposition à laquelle ces enfants seront soumis et par la vulnérabilité supposée plus grande de leurs tissus. ».
Le cœur de ce raisonnement , repris en 2009, repose sur l’idée suivante : sur le temps court de l’exposition aux ondes électro magnétiques ( portables, antennes relais, WIFI) le risque est très improbable, mais en revanche, sur le temps long, et plus encore avec un usage intensif, « on ne peut formellement montrer l’inexistence d’un risque ».
Autrement dit : les enfants qui commencent à se visser un portable sur l’oreille dés douze ans et qui le garderont sans doute jusqu’à la fin de leur existence, sont des cobayes. On ne vérifiera les effets ou l’innocuité que longtemps après la première exposition. ( Voir sur ce Blog)
En 2009, le rapport de l’Afsset mettait en évidence l’existence d’effets des radiofréquences dits « non thermiques » sur des « fonctions cellulaires, rapportés par une dizaine d’études expérimentales considérées comme incontestables ». Encore une fois l’Afsset ne concluait pas à des effets cancérigènes démontrés mais évoquait des « signaux indéniables »
La préconisation pour les enfants était donc réaffirmée : « réduire l’exposition des enfants en incitant à un usage modéré du téléphone portable. » Et pour les autres, fournir aux utilisateurs d’équipements personnels émetteurs de radiofréquences des mesures simples pour leur permettre de réduire leur exposition, s’ils le souhaitent ».
Lors du « Grenelle des ondes » ( Voir sur ce Blog : le Grenelle de l’Oreillette ) , rapidement expédié, tout cela avait été évoqué (recours à des téléphones mobiles de faible DAS, abaissement des niveaux d’exposition dans les zones présentant les intensités les plus fortes, usage modéré des technologies sans fil)- et Chantal Jouanno avait même mis su la table l’idée somme toute raisonnable d’un portable pour collégien dont l’oreillette ne pouvait être désolidarisée du mobile.
Sans suite.
Et si les opérateurs notent bien aujourd’hui le niveau d’émission de chaque modèle, ils n’en font nullement un critère d’achat discriminant Quant aux conseils de modération d’usage stipulé dans les modes d’emploi , il sont anéantis par le rouleau compresseur marketing vantant la modernité des appareils les plus récents. A commencer par les smartphones.
La vérité c’est que c’est le Ministère de la Santé qui n’a pas fait son job. Vous avez déjà vu une campagne de sensibilisation sur l’usage modéré des portables chez les jeunes ? Ou à destination des adultes ? Vous avez déjà entendu des recommandations sur l’utilisation de l’oreillette ? Rien ou pratiquement rien.
Certes, la loi interdit dorénavant aux écoliers les portables à l’école primaire et aux opérateurs de faire de la pub pour les moins de douze ans. C’est mieux que rien mais la vente est toujours légale à ces âges là . Du coup, entre 9 et 10 ans, 63% des enfants sont équipés. Et entre douze ans et quatorze ans, c’est 74%…
Interdire n’est sans doute pas la solution idéale. Mais informer et sensibiliser aux risques est un devoir sanitaire. Seulement voilà, à force de canarder « le politiquement correct » du « principe de précaution », y compris à l’Académie des sciences, on préfère laisser faire et ricaner sur les fatwas des ayatollahs anti progrès. C’est faciel, ça ne coûte rien et ça rapporte beaucoup. A bien y regarder, ce laisser faire ne concerne d’ailleurs pas seulement les ondes electro magnétiques. La consommation du tabac est de nouveau en hausse chez les jeunes. Pareil pour l’alcool. Ce gouvernement qui s’embrouille aujourd’hui dans les radars pédagogiques, a manifestement un problème avec la prévention.
Guillaume Malaurie