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Jean-Christophe Arguillère, 45 ans, directeur régional d’Orange-France Télécom, a immédiatement accepté notre proposition d’interview. Il faut dire que l’affaire de l’antenne relais du Mont Duplan est un feuilleton nîmois qui illustre parfaitement la grande crainte des Français à l’égard des ondes de téléphonie mobile. Une affaire qui frise même la caricature : l’antenne surplombe trois écoles, une crèche, un jardin d’enfants. Vendredi 16 octobre, le tribunal administratif dira si le principe de précaution doit jouer, oui ou non.
Pourquoi Orange s’accroche-t-elle à ce point au Mont Duplan ?
Quand on met en place de nouveaux relais, c’est que l’on en a besoin. Le coût d’investissement d’un relais est très élevé, plusieurs centaines de milliers
d’euros. Sur la zone de Nîmes, on avait le relais de la Calandreta qui nous permettait d’écouler le trafic aux alentours, mais la mairie a souhaité qu’on l’enlève, à cause de l’école justement (en 2008, après huit ans de fonctionnement, NDLR). On essaye de travailler en bonne intelligence avec les collectivités locales. Du coup, on a demandé à la Ville qu’elle nous conseille pour qu’on puisse s’installer à un autre endroit. La proposition du Mont Duplan, nous l’avons retenue parce qu’elle nous permettait de ne construire qu’un seul pylône de 20 mètres, alors que les autres sites nous obligeaient à installer deux pylônes de 25 mètres. C’est ce que l’on a dit au sénateur-maire.
Ce pylône spectaculaire, quel en est l’intérêt stratégique ?
On a une mauvaise qualité de service, en tout cas pas optimale sur une grande partie de la ville de Nîmes, depuis qu’on a arrêté la Calandreta. On n’arrive pas à écouler notre trafic. Nos clients rencontrent des problèmes d’émission et de réception.
Quelle zone l’antenne doit-elle couvrir ?
Le centre-ville. Il faut regarder cela comme une toile d’araignée. Si l’on enlève un morceau, cela ne fonctionne plus, ou mal. Aujourd’hui, il y a un trou dans la raquette. Cette antenne est indispensable. Pour Orange mais aussi pour SFR, puisque ce pylône va servir aux deux opérateurs.
Mais tout de même, cet emplacement, avec ces écoles, ce terrain de jeux fréquenté par de nombreux enfants… Des parents sont inquiets. Vous-même, vous êtes peut-être père de famille…
Non, mais cela ne change pas le problème. Je ne suis pas un meurtrier (rires). Aux personnes qui disent que les antennes sont nocives, moi, ce que je peux dire, c’est que c’est faux. Il a été donné aux opérateurs des normes à respecter, entre 41 et 61 volts/mètre.
Justement, à la suite du Grenelle des antennes, en avril, l’Etat lance une expérimentation avec des émissions à 0,6 V/m, une norme bien plus basse et adoptée dans d’autres pays…
Ce n’est pas la norme de l’OMS, de l’Union européenne ou de la France. Ce n’est basé sur rien, les opérateurs s’y opposent. Aujourd’hui, il n’y a aucun principe de précaution qui ait été défini, y compris dans le Grenelle des antennes.
Pourtant, depuis le début de l’année, la justice a fait jouer ce principe de précaution et fait démonter plusieurs antennes en France…
Effectivement, des jugements n’ont pas été favorables à des opérateurs. Mais la plupart vont dans leur sens. Maintenant, si vous y retrouvez vos petits, tant mieux. Mais il n’y a aucune réglementation qui dise qu’il faut installer des antennes qui émettent à 0,6 V/m. D’ailleurs, si on reprend la Calandreta, des études de propagation des ondes ont montré que l’on était 500 à 1 000 fois inférieur à la norme. Et 90 % de nos antennes sont inférieures à la norme. Dès que l’antenne sera mise en service au Mont Duplan, on fera des études pour dire publiquement sa puissance.
Le tribunal administratif a décidé de statuer sur le fond avant que l’antenne ne soit branchée. Ce qui convient bien aux opposants. L’audience de vendredi vous inquiète-t-elle ?
Non, je ne vois pas pourquoi je serais inquiet alors que l’on respecte les normes et les règles municipales.
Photos Bruno CAMPELS